« Libérer » le travail journalistique ou « démocratiser » l’entreprise de presse ?

Polyvalence versus collégialité dans deux rédactions françaises

Valentina Grossi[1]

Les nouvelles formes d’organisation des entreprises de presse semblent avoir intégré les critiques traditionnellement portées au système taylorien d’organisation du travail, accusé de contraindre les salariés à réaliser des tâches monotones et segmentées, et de progressivement tarir leur engagement dans le travail (Friedmann, 1956). On assiste en effet, depuis quelques décennies déjà, à un mouvement de restructuration à l’intérieur des rédactions. Il s’agit d’un déplacement, dans l’organisation du travail, d’un modèle calqué sur la division en spécialités fonctionnelles et un séquençage des activités typiques des chaînes de montage industrielles vers des organisations du travail que l’on pourrait appeler « agiles » ou « libérées ». Ces structures réduites, où les places ne sont pas totalement définies, et où la polyvalence et l’esprit d’adaptation des journalistes jouent une place centrale, s’apparentent au modèle organisationnel de la start-up. Les niveaux hiérarchiques sont moins nombreux et les frontières entre services et corps de métier ne sont pas tracées a priori, permettant une plus grande mobilité et polyvalence.

Les rédactions web semblent être un terrain particulièrement adapté pour observer ces mutations organisationnelles. D’une part, en raison de leur récente création, elles ont adopté plus rapidement des innovations managériales qui s’avèrent difficiles et lentes à mettre en œuvre dans des rédactions plus anciennes. D’autre part, en intégrant dans leurs effectifs des journalistes jeunes, ayant développé des formes de sociabilités nouvelles et d’autres manières de se rapporter au travail, elles sont censées répondre à des attentes d’épanouissement et de réalisation de soi légèrement différentes par rapport aux rédactions de la génération précédente. C’est pourquoi elles peuvent être considérées par les manageurs comme un « laboratoire » du journalisme de demain (Estienne, 2007), et, par les sociologues, comme un poste d’observation permettant de mettre à jour des tendances et, éventuellement, essayer de prévoir des évolutions futures.

Dans le cas d’une « industrie culturelle » telle que l’entreprise de presse, ce mouvement de flexibilisation et de « libération » du travail semble être d’autant plus inéluctable que la tension entre la structuration industrielle de l’activité, d’un côté, et les aspirations à l’autonomie et à l’authenticité portées par le « travailleur culturel », de l’autre, a été pointée comme la raison de l’insatisfaction structurelle de ce dernier (Morin, 1961). D’où la question que nous poserons ici : à quelles conditions ces nouvelles organisations du travail journalistiques sont-elles réellement vectrices de démocratisation et d’autonomisation ? À travers la comparaison entre deux rédactions différemment structurées, nous essaierons de comprendre si la libération annoncée et promue par ces nouvelles formes d’organisation du travail journalistique s’accompagne effectivement d’une démocratisation de l’entreprise de presse et si elle répond de manière adaptée aux aspirations à l’autonomie des journalistes qui y travaillent.

1. Définition préalable et méthode

Avant d’aborder ces questions, une définition préalable de ce que l’on entend par « démocratie » au travail est nécessaire. Préciser sociologiquement le sens de ce terme s’avère en effet indispensable pour éviter de reprendre à son compte, sans les retraduire, des définitions tirées d’autres disciplines (et donc potentiellement incompatibles avec une enquête d’esprit sociologique) ainsi que pour se donner des critères de descriptibilité délimitant ce à quoi l’on sera attentif sur le plan empirique.

La centralité de la question l’autorégulation et du contrôle des finalités de l’activité se retrouve dans les définitions de la démocratie au travail proposées par certains philosophes. Pour le philosophe pragmatiste John Dewey, « ce que “démocratie” veut dire est que l’individu doit participer à la détermination des conditions et des objectifs de son propre travail » (Dewey, 1903, p. 197 ; traduit par Cukier, 2017). Mais l’importance de la prise que les travailleurs ont sur les normes et les finalités de leur activité revient aussi chez des sociologues. Sans forcément parler de démocratie au travail, mais mettant en avant la dimension collective de l’autorégulation, des sociologues interactionnistes comme Everett Hughes ou Eliot Freidson ont mis au centre de leurs analyses les processus par lesquels des groupes ou des segments professionnels arrivent, au fil des interactions entre collègues et avec les groupes sociaux environnants, à établir un contrôle sur les finalités de leur activité et à élaborer de manière relativement autonome, par rapport aux demandes extérieures, les normes du « bon travail » (Hughes, 1996 ; Freidson, 2001). C’est de cette définition de la « démocratie » au travail – entendue comme la prise sur les normes et les finalités de l’activité que les acteurs ont collectivement la capacité d’élaborer, au cours de leurs interactions – que nous nous inspirons dans le présent travail.

Mais à quel niveau doit se placer l’analyse pour observer si les travailleurs disposent effectivement d’une telle prise, au-delà des prétentions managériales à « libérer » et fluidifier le travail ? Comment se donner des critères permettant d’observer concrètement des processus de démocratisation (ou, inversement, de « dé-démocratisation ») au travail ? Encore une fois, c’est aux interactions quotidiennes et à l’activité en train de se faire que nous serons particulièrement attentifs. Sans négliger les apports des travaux sur les dispositifs de représentation des salariés, leur participation aux instances de gouvernement de l’entreprise ou leur engagement dans des groupes de réflexion en parallèle de leur travail au quotidien, le plan de l’activité nous semble primordial. Il est en effet nécessaire pour rendre compte de la manière dont les acteurs arrivent à élaborer à partir de leurs pratiques, des gestes qu’ils accomplissent, des interactions qui tissent leur quotidien – et non in abstracto – une prise sur les normes et les finalités de leur activité (Bidet, 2011).

En nous inscrivant dans une sociologie pragmatique d’inspiration durkheimienne (Lemieux, 2018), nous partirons de l’hypothèse continuiste selon laquelle l’activité, les problèmes qu’elle fait surgir et les interactions que les acteurs produisent pour les résoudre donnent a priori lieu à des montées en réflexivité qui amènent les acteurs à discuter des normes du « bon travail » et à arbitrer entre différentes finalités (Lemieux, 2009), ce qui leur permet d’élaborer une prise sur ces mêmes normes et finalités. Cela confère une certaine « épaisseur politique » à l’activité, pour reprendre un terme de la sociologue Marie-Anne Dujarier (Dujarier, 2017, p. 35). Mais, si cette tendance à la réflexivité est partout observable, certaines organisations du travail ne facilitent pas ces processus de montée en réflexivité – voire les entravent –. Dans certaines situations – dont il nous faudra élucider les contours – il devient plus difficile pour les acteurs de questionner, renégocier, réélaborer ou consolider, au fil des interactions quotidiennes entre collègues et avec les groupes sociaux auxquels ils sont confrontés (dans le cas des journalistes, les « publics » ou les « sources », par exemple), les normes et les finalités de leur activité.

Le plan des interactions et des pratiques ne sera donc pas le seul à nous intéresser. L’organisation du travail sera ici considérée comme déterminante en ce qu’elle encourage ou décourage cette réflexivité. En effet, la capacité à élaborer un rapport réflexif au travail n’est pas tant à rechercher au niveau des « capacités cognitives » des individus observés que dans la manière dont l’activité est organisée et dans les interactions qu’elle rend possibles, puisque c’est à partir de ces interactions même que la montée en réflexivité s’effectue. L’attention portée aux dispositifs de travail (organisation matérielle des espaces, division en groupes ou en segments professionnels, fréquence et intensité des contacts, liens entretenus avec l’extérieur, etc.) nous permettra donc de nous interroger sur ce qui, sur le plan organisationnel, encourage ou freine la réflexivité des acteurs et la prise sur les normes et les finalités du travail.

On analysera ici l’activité journalistique au sein de deux rédactions françaises, à l’intérieur desquelles le travail est organisé de manière différente. L’une est la rédaction print d’un quotidien national, où la division entre services et corps de métiers reste centrale. L’autre est la rédaction web d’un news magazine, marquée par une organisation du travail en rupture avec celle de la rédaction print observée, à l’intérieur de laquelle l’individu devient, à la place du service ou du corps de métier, l’unité productrice de base. Au sein de cette structure légère, les places sont moins définies, la mobilité et la polyvalence des journalistes plus importante. On pourrait donc s’attendre à une plus grande prise des individus les finalités et les normes de leur travail. Mais sommes-nous réellement face à une organisation du travail vectrice de démocratisation, au sens précisé plus haut ?

Avant de rentrer dans une analyse plus détaillée des deux cas présentés, il faut ici préciser que les données récoltées proviennent de deux ethnographies d’une durée de quatre mois dans chacune de ces rédactions. Dans le cadre de notre thèse (Grossi, 2018), nous y avons observé la production, la sélection et la publication d’images d’actualité par une multiplicité d’acteurs (photographes, rédacteurs en chef, rédacteurs, éditeurs photo, iconographes, documentalistes, etc.). La focalisation sur une activité particulière – la production et la publication d’images photojournalistiques – nous a permis d’observer la manière dont une pluralité de segments appartenant au groupe professionnel des journalistes sont amenés à travailler ensemble, et la façon dont leurs apports spécifiques sont régulés par l’organisation du travail. Dans la collaboration, se pose en effet la question de leur interaction constante, de la résolution des conflits et de la montée en réflexivité permise – ou entravée – par les différentes structures organisationnelles.

2. Une prise sur les normes du « bon travail » permise par la confrontation collégiale

Dans la rédaction print du quotidien national observé, l’organisation du travail se caractérise tout d’abord par l’importance de la division en spécialités fonctionnelles. Celle-ci se manifeste dans une division en « services » correspondant à des segments professionnels bien délimités (quoiqu’appartenant tous au groupe professionnel des « journalistes »), chacun d’entre eux étant dirigé par un « chef de service ». Les frontières entre les compétences attribuées aux rédacteurs (repartis à leur tour en rubriques), aux éditeurs, aux iconographes, aux photographes, aux maquettistes et aux membres de la direction de la rédaction sont claires et correspondent à une répartition préétablie des activités de chacun de ces segments professionnels. Ces dernières sont censées se compléter mutuellement, aucune n’étant indépendante de l’activité des autres. Les services doivent en effet collaborer de manière très serrée tout au long de la journée pour fabriquer le produit final : le journal imprimé.

L’importance de la coordination nécessaire pour aboutir à la production du journal imprimé à la fin de la journée se remarque par la fréquence des interactions formelles et informelles qui maillent le quotidien de chacun de ces professionnels. Les journées sont rythmées par une série de réunions plus ou moins institutionnalisées : à 10h a lieu la conférence de rédaction, à laquelle peuvent participer tous les salariés de l’entreprise, sans distinction de statut, et où sont évoqués et discutés les principaux sujets d’actualité à préparer pour le journal du lendemain ainsi que leurs « angles ». Cette conférence est suivie par des réunions dans chacun des services, à l’intérieur desquels on commence à se préparer collectivement à la réalisation concrète des sujets évoqués en conférence de rédaction. Autour de 11h ont lieu les réunions visant à imaginer de manière plus précise et concrète les différentes séquences du journal, qui rassemblent le petit groupe de professionnels (rédacteurs, maquettistes, éditeurs, iconographes et au moins un membre de la direction de la rédaction) qui sont amenés à travailler sur une séquence en particulier (« Monde », « France », « Économie », etc.). À 14h30 a lieu la réunion « édition », à laquelle sont présents tous les éditeurs, les maquettistes, quelques membres de la direction de la rédaction et un ou deux iconographes. Il s’agit d’une réunion qui sert à vérifier que les différentes séquences du journal se calent bien dans le chemin de fer au niveau de la pagination, mais aussi à appréhender le journal d’un point de vue global et à s’assurer d’une certaine cohérence d’ensemble. Pour finir, une « réunion de Une » est généralement prévue aux alentours de 17h30 pour discuter de la forme concrète, en termes d’images et de titraille, que prendra la première page du journal. Cette réunion voit la participation d’au moins un des directeurs de la rédaction, du maquettiste et de l’éditeur s’occupant ce jour-là de la Une, du chef du service photo ou de l’une de ses adjointes et, de manière plus aléatoire, du chef de la rubrique ayant porté les pages « Événement » (« Monde » s’il s’agit d’actualité internationale, « France » s’il s’agit d’actualité nationale, etc.) ou d’autres rédacteurs ayant collaboré à sa production. Ces différentes réunions constituent, pour les différents professionnels engagés dans l’activité, un rappel de l’horizon de sens élaboré collectivement, et les aident à inscrire leur activité à l’intérieur de celui-ci. Le journal imprimé est donc le résultat d’une négociation intense entre des professionnels qui, tout en partageant un horizon d’attente commun, sont collectivement reconnus comme ayant des compétences spécifiques et desquels on attend un apport bien particulier au produit final, selon leur appartenance à un service plutôt qu’à un autre.

Il faut également mentionner que, au-delà des réunions instituées, de nombreux échanges informels, facilités par la proximité spatiale entre les différents services, ont lieu tout au long de la journée et sont essentiels au bon déroulement de l’activité de travail. L’observation des réunions ainsi que des moments d’échange informels fait émerger que les spécialités de chaque service sont collectivement reconnues. Chaque service, correspondant à un segment professionnel en particulier, se voit reconnaître au fil des interactions avec les autres une certaine autorité, qui s’accompagne d’une responsabilité[2] collective sur des pans du travail en particulier. Par exemple, les iconographes, en charge de la commande de production photo auprès des photographes et de la sélection des images, peuvent se voir féliciter dans la conférence de rédaction lorsque le journal de la veille est collectivement reconnu comme « beau » par les professionnels. Inversement, les cas où le mariage entre textes et images est collectivement reconnu comme moins réussi amènent à une remise en question de la part de ce même segment professionnel, notamment au moment de la réunion interne au service.

Extrait d’observation n°1 : « Quand on a une image en complément et non pas en illustration on a fait le job »

C’est le moment de la réunion interne du service photo. Auriane [chef du service photo adjointe] déplace sa chaise à la gauche de celle de Cécile [chef du service photo adjointe], et commence à parler des sujets du jour. Éric [chef du service photo] l’interrompt : « D’abord j’aimerais faire des remarques sur le journal d’aujourd’hui. Il faut qu’on fasse attention, là par exemple on a deux grandes photos, Lyna [iconographe] avait déjà fait la remarque : on sait pas si regarder celle-là ou celle-là. ». […]. Éric ouvre une double page sur l’exclusion des syndicats FN de la signature d’un texte dans l’esprit de la marche républicaine du 11 janvier signé par tous les autres syndicats. En indiquant avec le doigt les deux images, l’une sur la page de droite et l’autre sur la page de gauche : « Et ça, pareil… ».

Auriane : « Là en fait il y avait les syndicats [elle indique la photo de droite où l’on voit un des cortèges du 11 janvier], et lui [en indiquant la photo de gauche] c’est Fabien Engelmann, le maire FN d’Hayange, qui a été exclu de la CGT, ils en parlent dans le papier. »

Éric : « Oui je sais, mais il faut essayer d’être moins littéral, arriver un peu à s’extraire de ce qui est dit dans le papier, on est dans un journal de choix. »

Auriane : « Mais si tu veux on a fait les légendes en conséquence… »

Éric : « Oui, mais on comprend pas, toi tu comprends parce que tu as lu le papier… »

Auriane : « La complication qui va arriver c’est que là ils font des papiers à quatre mains… Il y avait une demande de l’édition à voir les syndicats au moment de Charlie, et l’offre sur Charlie sur les syndicats est minime… Sur le sociétal et le politique ils vont être sur une logique d’avant-papier, et là, accroche-toi [elle fait une grimace]. Il faudra revoir la production et le traitement, il faudra sortir d’une logique de production… »

Anne [iconographe] acquiesce avec la tête.

Éric : « Non mais là on est dans une tendance à plus illustrer, alors qu’on avait réussi à prendre nos aises, à être décalés. On est dans l’illustration du texte. »

Auriane : « C’est sûr que quand on a une image en complément et non pas en illustration on a fait le job. »

Éric : « Il faudra être plus vigilants, ne pas se laisser emporter par le flux… »

Auriane : « Cette page, elle a été vachement discutée entre rédacteurs, éditeurs… C’est des papiers qui sont arrivés à 17 h, pas édités… »

Cécile : « Mais ce que je comprends pas, c’est le sujet, c’est les syndicats contre le FN ? »

Auriane (en indiquant la photo d’Engelmann) : « Lui, si tu veux, c’est le symbole du mec syndiqué FN exclu. »

Cécile : « Ah d’accord, j’avais pas compris. »

Auriane : « On l’avait dit avec Lyna, il y a trop d’images dans les pages, comment faire ? »

Cécile : « Moi je trouve que c’est varié comme images, c’est agréable. »

Éric : « Oui, c’est juste une alerte pour continuer à être bons. »

Ce qui apparaît clairement dans cet extrait, aussi bien qu’à d’autres moments observés, c’est que les iconographes peuvent se sanctionner mutuellement, et se considèrent donc collectivement responsables si le travail n’a pas été réalisé dans le respect certaines normes professionnelles. Mais ce qui émerge aussi c’est que les normes du travail ainsi que ses finalités ne sont pas définies une fois pour toutes à l’extérieur du segment professionnel. À l’intérieur du segment (et en ce sens la réunion interne à chaque service constitue un moment crucial), les interactions intenses entre professionnels contribuent constamment à interroger et à définir ce qui peut être considéré comme du bon ou du mauvais travail. Ces moments de collégialité amènent les acteurs à se sanctionner mutuellement, tout en explicitant, en reformulant et consolidant collectivement les normes du « bon travail » : en somme, à monter en réflexivité, en questionnant leur rôle à l’intérieur de l’organisation et en redéfinissant le sens de leur activité.

Ces montées en réflexivité sont aussi ce qui permet au segment de développer une définition de l’activité partiellement autonome et légèrement en décalage par rapport à ce qui lui est demandé de l’extérieur. Par exemple, dans la séquence citée, l’une des chefs du service photo adjointes rappelle que la demande des éditeurs était celle d’avoir des photos correspondant le plus possible aux textes des rédacteurs (« Il y avait une demande de l’édition à voir les syndicats au moment de Charlie, et l’offre sur Charlie sur les syndicats est minime »). Mais l’interaction qui s’ensuit entre membres du service photo aboutit, au fur et à mesure, à reconnaître que l’essentiel est de trouver « une image en complément et non pas en illustration », sans forcément coller exactement aux demandes des autres services du journal.

Cette définition partiellement autonome des normes du travail est d’ailleurs ce qui permet à chaque membre du service de sanctionner les autres pour ne pas les avoir respectées. Loin d’être une « responsabilisation » qui vient d’en haut, cette forme de responsabilisation mutuellement consentie est aussi ce qui permet aux membres du service de forger une forme de résistance collective face aux demandes venues de l’extérieur (de la hiérarchie ou d’autres services) lorsque celles-ci ne seraient pas en adéquation avec les normes élaborées en interne. Sans pouvoir aller jusqu’à un « droit de véto » sur les décisions de la rédaction en chef, ces normes collectivement élaborées leur permettent a minima de critiquer, de reformuler ou de négocier les injonctions que les professionnels considèrent comme allant à l’encontre de leur définition du « bon travail », comme on le constate dans l’extrait d’entretien qui suit :

« Q : Et est-ce que tu as des exemples de désaccord avec les éditeurs sur les photos ?

Ouais, j’en ai eu un, à un moment donné, sur l’histoire de… il comprenait pas, pourtant c’était assez simple, c’était sur une photo de Thibault Arthus sur les trains de nuit, sur l’arrêt des trains de nuit en fait, parce que la SNCF tend à vouloir arrêter les trains de nuit parce que c’est trop cher, et donc on avait utilisé une prod qu’on avait faite [] sur ce sujet-là typiquement, il y avait une photo comme ça, de nuit, où tu voyais juste des rails, et un truc assez… très voyage, tu voyais pas grand chose à part la nuit, et un rail, et il comprenait pas, mais je leur ai imposé un petit peu, en disant, franchement, voilà, le sens il est là, c’est beau ; eux, il y avait tout un groupe d’éditeurs qui comprenait pas l’image, qui la sentait pas. Ça arrive. » (entretien avec le chef du service photo)

À partir de cet entretien, et plus généralement à partir de l’ethnographie réalisée dans cette entreprise de presse, on remarque que les acteurs sont conscients que l’élaboration de normes relativement autonomes peut potentiellement les amener à des conflits avec la hiérarchie ou avec d’autres segments ne partageant pas tout à fait la même conception du « bon travail ». Mais les frictions et les conflits avec les collègues ne sont pas forcément perçus comme un problème à résoudre. Les acteurs eux-mêmes les considèrent comme constitutifs de l’activité et comme une manière, justement, de remettre à chaque fois à l’épreuve, dans la confrontation, leur propre conception du travail bien fait, au prix de « batailler » ou de l’« imposer un petit peu ».

3. Une polyvalence et une rotation rendant difficile la montée en réflexivité

Passons maintenant au cas de la rédaction web. L’organisation de celle-ci est fortement en rupture par rapport à celle que nous venons de décrire. Tout d’abord, l’effectif est réduit en comparaison avec celui de la rédaction print : une quarantaine de personnes y travaillent, contre 160 journalistes dans la rédaction print observée. La taille réduite de la rédaction va avec une moindre spécialisation des journalistes, qui peuvent être amenés à changer de poste et de tâches en cas de besoin. Nombreux sont les moments où des professionnels changent physiquement de poste ou de rôle, pour prendre en charge des tâches généralement attribuées à d’autres journalistes de la rédaction. Par exemple, nous avons pu observer la Front page editor (la personne chargée d’animer la Home) prendre en charge ponctuellement le travail du community manager, une iconographe et une journaliste spécialisée dans l’actualité internationale venir en renfort du « Pôle live » (prenant en charge l’actualité « chaude ») ou le journaliste spécialisé dans la vidéo intervenir ponctuellement dans la gestion de la Home. Dans la rédaction, la flexibilité et la capacité de gérer la multi activité avec fluidité et aisance sont des compétences valorisées, venant définir la figure du journaliste « virtuose ». La comparaison fait déjà émerger un point important : la possibilité de prendre en charge les tâches effectuées par un professionnel appartenant à un autre service est quelque chose qui ne paraît pas concevable dans la rédaction print, où les segments professionnels sont collectivement considérés comme porteurs d’une contribution bien spécifique au produit final, à laquelle se rattachent à la fois une certaine autorité et certaines responsabilités.

Une autre caractéristique de cette rédaction web est la plus grande polyvalence des journalistes, qui prennent en charge un nombre d’activités beaucoup plus varié en comparaison de leurs confrères et consœurs du print, même lorsqu’ils sont censés réaliser uniquement leur tâche principale et n’occupent pas plusieurs postes à la fois. Par exemple, un rédacteur web effectue généralement tout seul la rédaction d’un papier, la recherche iconographique, l’édition, le titrage, le choix des mots clés, etc. Chaque journaliste n’a donc plus obligation de se coordonner avec une multitude de figures professionnelles afin de fabriquer le produit final, mais peut prendre personnellement en charge la réalisation d’un produit informationnel autonome, s’il fait preuve de polyvalence.

Cet effacement partiel des spécialisations fonctionnelles va de pair avec une simplification de l’organisation du travail et un plus faible découpage hiérarchique. D’une part, s’il est encore possible de rattacher chaque journaliste à une spécialité (rédaction de papiers portant sur l’« international » ou sur le « politique », production de diaporamas ou de vidéos, etc.), les professionnels ne sont pas insérés dans des « services » à proprement parler. Les services n’ayant plus de réelle consistance, on passe donc d’un modèle à trois étages « individu-service-rédaction » à un modèle bipolaire « individu-rédaction ». D’autre part, les chefs de service n’existant plus, les journalistes se trouvent confrontés directement à la direction de la rédaction, de laquelle ils sont aussi plus proches.

Prenant en compte ces caractéristiques organisationnelles, nous pourrions donc nous demander si nous ne sommes pas, dans le cas de la rédaction web, face à une organisation du travail vectrice de démocratisation, laissant davantage place à la liberté de mouvement, à la prise de décision individuelle et à la flexibilité, et permettant de diminuer la conflictualité liée aux interactions entre une pluralité de segments aux visions professionnelles distinctes. De plus, si l’on prend en compte que les acteurs prennent en charge plus d’étapes de production que dans la rédaction print, nous pourrions en conclure que leur autonomie professionnelle devrait en être accrue, car ceux-ci ne sont plus confrontés à une forte segmentation du travail, souvent pointée du doigt comme la cause d’une réduction des marges de manœuvre des acteurs.

Mais l’analyse des séquences ethnographiques recueillies semble démentir cette affirmation. Tout d’abord, en travaillant de manière plus isolée par rapport aux collègues, les professionnels ne prennent pas toujours la mesure de leur apport spécifique au produit final, le journal web. Ce relatif isolement les empêche également de développer, dans la confrontation avec les autres, les normes définissant le « bon travail », qui, dans la rédaction print, étaient constamment redéfinies, remises en question, et en même temps consolidées à l’intérieur de chaque segment professionnel. Ici, au contraire, chacun essaie d’avoir une prise ne serait-ce que minimale sur les normes du travail, mais celles-ci sont fragiles, peu reconnues collectivement. Car la montée en réflexivité n’est pas encouragée par des moments de confrontation institués ou informels, à l’intérieur des segments professionnels ou entre segments professionnels différents. Les acteurs peinent à trouver un espace d’action dans ce contexte, comme nous le comprenons à partir de cet extrait d’entretien avec la Front Page Editor, chargée de gérer le contenu présent sur la première page du site (la Home) :

« Sur le coup des photos pixellisées, t’as les réfractaires absolus quoi, genre les gens je sais que… Par exemple je sais que quand telle personne va bosser le matin à 7h, donc ça veut dire qu’il va être affecté au Pôle Live, je sais que toute la journée jusqu’à 16h, donc jusqu’à son départ, je vais me coltiner des photos pixellisées. Et à chaque fois je vais dire “Ahhh… dis donc, c’est dommage, c’est pixellisé !” Et aucune réaction quoi. C’est parce que cette personne n’a pas le courage, donc ça la soule de chercher une photo. Donc il préfère prendre la photo automatique dans la base. […]

Q : Mais en fait c’est fatigant même pour lui de recevoir à chaque fois…

Moi je dis plus rien maintenant, j’ai pas envie de… Enfin, je suis pas chef, tu vois ? C’est délicat. » (entretien avec la Front Page Editor)

Nous saisissons ici une grande différence par rapport à l’organisation du travail de la rédaction print décrite plus haut. Alors que dans cette dernière les conceptions du « bon travail » portées par les différents segments professionnels étaient considérées par les acteurs comme à la fois indépassables et indispensables pour la réalisation du produit final, ici l’expertise de la Front Page Editor – tout comme celle des autres salariés de la rédaction – n’est pas collectivement reconnue à l’intérieur de la rédaction comme faisant autorité. De son côté, la Front Page Editor ne semble pas accepter que les rédacteurs n’aient pas exactement la même définition qu’elle du travail bien fait. Mais l’impossibilité de se référer à des normes qui seraient collectivement définies par un segment professionnel et reconnues au niveau de la rédaction dans son ensemble la met dans une position inconfortable. Elle ne comprend pas pourquoi les rédacteurs devraient l’écouter, puisqu’elle n’est pas en position de supériorité hiérarchique, tout en étant amenée à intervenir à titre personnel sur leur production – et sans, pour cela, pouvoir s’appuyer sur des normes collectivement partagées.

Comme on le comprendra au fur et à mesure de l’ethnographie, des conflits individuels assez violents entre collègues peuvent ainsi s’instaurer, car les professionnels ont du mal à définir l’espace d’intervention des uns et des autres. Ils ont également des difficultés à dépersonnaliser les différends qui les opposent aux collègues. En effet, au lieu d’être considérés comme étant liés à la spécialité fonctionnelle de chacun, les conflits entre les différentes conceptions de « ce qu’il convient de faire » sont souvent interprétés par les acteurs eux-mêmes comme étant des conflits interpersonnels. On assiste, pour reprendre les termes de la sociologue Danièle Linhart, à une forme de « personnalisation » du travail, plutôt qu’à une montée en réflexivité qui permettrait aux acteurs de se référer à des « logiques professionnelles validées par des pairs » (2015, p. 10-11).

Cette organisation du travail plus lâche confronte aussi les salariés à un rapport dual à la hiérarchie, sans la médiation d’un segment professionnel ou d’un chef de service. En effet, les rédacteurs en chef et le directeur de la rédaction ne doivent pas prendre en compte, comme dans la rédaction print, le fait que chaque segment a la prétention à une forme d’autorégulation. Ils interagissent avec chaque professionnel de manière beaucoup plus individualisée, ce qui fait que les directives sont beaucoup plus explicites et aussi moins contestables par celui ou celle qui les reçoit. L’observation des processus de responsabilisation, et donc des sanctions réciproques, fait émerger que celles-ci viennent moins souvent des collègues (et donc, des pairs) que de la hiérarchie. Cette dernière formule plus explicitement que dans la rédaction print les objectifs et les normes du « bon travail » en direction de chaque salarié pris individuellement – en les soustrayant partiellement à la discussion collégiale –.

Extrait d’observation n° 2 : « Adrien en veut pour son argent »

Il est midi, un vendredi. Axelle [rédactrice-iconographe] et Rémy [rédacteur-iconographe] sont assis à leur bureau devant leurs ordinateurs. Je suis assise à côté de Rémy. Axelle à Rémy : « Il y en a plein de diapos sur le Bon Coin ». [Je comprendrai ensuite qu’Adrien, le directeur de la rédaction, a demandé à Axelle de faire un diaporama sur « Les pépites du site Le Bon Coin » dans lequel sont répertoriées des annonces drôles et décalées]. […]

12h16. Axelle rigole toute seule regardant son écran. Après quelques minutes, à Rémy : « L’appartement de Merah “bien aéré” où on voit les trous je le mets pas… » Rémy sourit. Axelle : « J’ai trouvé plein de trucs, viens voir ! ». Rémy se lève pour aller regarder l’écran d’Axelle. Les deux rigolent en regardant les différentes annonces du Bon Coin. Retourné à son bureau, Rémy envoie à Axelle un mail où il indique des liens pour trouver des « annonces rigolotes » sur le Bon Coin, en rajoutant dans le corps du mail : « N’hésite pas à en chercher plein… Adrien en veut pour son argent ». Axelle et Rémy, chacun devant son ordinateur, commencent à regarder les annonces qui apparaissent sur les sites signalés par Rémy. Ils rigolent. Rémy à propos d’une annonce d’une voiture défoncée : « Celle-ci serait super comme première image ! ». Axelle à propos de la photo d’un écureuil empaillé : « Ça, je vais l’envoyer à Adrien pour motiver mes démissions : “J’en peux plus de voir ces trucs”… ». Ils rigolent. Rémy à propos d’une photo d’un écureuil empaillé qui sert de bouteille : « Si tu veux être virée, tu mets ça comme première image ». Ils rigolent. Rémy : « Là Adrien va se gaver… », puis : « Moi je dois quand même finir ce que j’étais en train de faire… » [un diaporama sur le Festival de Cannes].

13 h. Axelle à Rémy : « En fait il y a un côté un peu déprimant à faire les annonces du Bon Coin, tu trouves pas ? ». Rémy sourit et ne répond pas. Après quelques minutes, Axelle rigole toute seule regardant son écran. Elle se cache le visage avec les mains, excitée, et s’exclame : « C’est pas possible ! »

Comme on le constate dans cet extrait (et, plus globalement, tout au long de l’ethnographie), les normes du travail ainsi que les objectifs fixés sont formulés de manière assez précise par le directeur de la rédaction – lequel, dans ce cas, demande individuellement à l’une des deux rédacteurs-iconographes de réaliser un diaporama sur des annonces décalées publiées sur le site Le Bon Coin. La pertinence de réaliser un tel travail n’est pas soumise à la discussion collective. Elle devient donc une « tâche » à réaliser que la rédactrice-iconographe n’a pas, individuellement, les moyens de contester, ne pouvant pas s’appuyer sur des normes du « bon travail » collectivement définies. On remarque également que les sanctions positives ou négatives anticipées par les deux rédacteurs-iconographes au cours de leur travail ne sont pas tant celles des pairs (les journalistes travaillant dans la même rédaction, ou dans les rédactions de journaux concurrents), basées sur une définition du « bon travail » collectivement élaborée, que celles du directeur de la rédaction, basées sur des critères dont la définition échappe aux acteurs.

Si un ton ironique et parfois ouvertement critique transparaît tout au long de cette séquence, on s’aperçoit aussi que les interactions entre collègues n’aboutissent pas à la formulation plus « positive » de normes alternatives aux injonctions en provenance de la hiérarchie. En effet, ces moments d’interaction sont nécessaires pour qu’une critique ne serait-ce que minimale puisse s’exprimer ; cependant, en étant sporadiques et manquant d’un collectif permettant de les instituer, ils ne sont pas suffisants pour transformer cette critique en processus collégial de redéfinition des finalités et des normes du travail.

Conclusion

Les promesses de libération du travail incarnées par de nouvelles structures organisationnelles « légères », proches du modèle de la start-up, sont-elles effectivement réalisées, dans le cas particulier du journalisme ? Est-ce que la liberté de mouvement et la polyvalence des journalistes s’accompagnent d’une réelle démocratisation du travail ? Nous avons souhaité poser ces questions à partir d’une redéfinition conceptuelle de la « démocratie » au travail, entendue comme la prise des acteurs sur les normes et les finalités de leur activité, développée au cours de l’action. Sur le plan empirique, l’attention aux processus de responsabilisation (Fauconnet, 1928) nous a permis d’analyser cette activité normative en train de se faire, au ras des pratiques elles-mêmes, et d’observer le degré des montées en réflexivité auxquelles elle donne lieu.

La comparaison entre deux structures organisationnelles différentes fait émerger que, si des processus de responsabilisation sont toujours repérables, ceux-ci prennent des formes très contrastées selon la manière dont le travail est organisé. Dans la rédaction print observée, où l’organisation donne une place importante à la collégialité, et où des groupes de travail (des « services » ou des segments professionnels) maintiennent une certaine consistance, les acteurs ont la possibilité de déplacer, ne serait-ce que de manière minimale, la définition du « bon travail » et de ses finalités. Les normes étant à chaque fois exprimées et reformulées collectivement, chaque acteur développe une prise sur celles-ci, et peut éventuellement les mobiliser pour sanctionner ses pairs au cas où ces derniers s’en écarteraient sensiblement. En revanche, dans la rédaction web, cette activité normative est beaucoup moins distribuée. En travaillant de manière plus isolée, n’étant plus censés se coordonner avec d’autres à l’intérieur d’un service ou entre services différents, les professionnels ne peuvent pas développer et consolider au cours de l’action, dans la confrontation avec les collègues, les normes définissant le « bon travail ». Cela se retraduit par une perte de réflexivité collective des salariés, en les confrontant à un rapport dual à la hiérarchie, laquelle tend à figer et à naturaliser les finalités de l’activité. Si, dans un cas, la responsabilisation peut être vectrice de démocratisation, cela est beaucoup moins vrai dans l’autre, où la responsabilité individuelle à répondre aux attentes de l’organisation ne s’accompagne pas d’une responsabilité collective dans la définition du « bon travail ».

La moindre participation à l’élaboration des normes et des finalités du travail est donc à mettre en lien avec l’absence de groupes assez stables pour servir en quelque sorte de corps intermédiaires entre les individus et l’entreprise, corps intermédiaires qui constituent les lieux d’une élaboration normative essentielle au maintien d’une certaine « épaisseur politique » du travail. Ce qui nous paraît en cause dans des processus de « de-démocratisation », donc, n’est pas tant la polyvalence ou la rotation en tant que telles, que l’absence de collectif que celles-ci peuvent entraîner quand elles sont utilisées (sciemment ou non) pour diminuer les moments de collégialité et de délibération, essentiels pour l’élaboration d’une définition partiellement autonome des normes, des finalités et du sens du travail.

Bibliographie

Bidet A., 2011, L’engagement dans le travail. Qu’est-ce que le vrai boulot ?, Paris, PUF.

Cukier A., 2017, « Critique démocratique du travail », Tracés, n° 32, 145-164.

Dewey J., 1903, « Democracy in Education », The Elementary School Teacher, vol. 4, n° 4, 193-204.

Dujarier M.-A., 2017 [2015], Le management désincarné. Enquête sur les nouveaux cadres du travail, Paris, La Découverte.

Estienne Y., 2007, Le journalisme après internet, Paris, L’Harmattan.

Fauconnet P., 1928, La responsabilité : étude de sociologie, Paris, Félix Alcan.

Freidson E., 2001, Professionalism. The Third Logic, Chicago, University of Chicago Press.

Friedmann G., 1956, Le travail en miettes. Spécialisation et loisirs, Paris, Gallimard.

Grossi V., 2018, L’image négociée. Une sociologie des professions du photojournalisme à l’ère numérique, thèse de doctorat, EHESS.

Hughes E. C., 1996, Le regard sociologique. Essais choisis, Paris, Éd. de l’EHESS.

Lemieux C., 2009, Le devoir et la grâce, Paris, Economica.

Lemieux C., 2018, La sociologie pragmatique, Paris, La Découverte.

Linhart D., 2015, La comédie humaine du travail. De la déshumanisation taylorienne à la sur-humanisation managériale, Toulouse, Érès.

Morin, E., 1961, « L’industrie culturelle », Communications, vol. 1, n° 1, 1961, 38-59.


  1. Université de Strasbourg, CUEJ, SAGE
  2. Nous utilisons ici le terme « responsabilité » au sens élaboré par Paul Fauconnet (1928). Fauconnet a mis en avant, dans son étude pionnière, que l’analyse sociologique de la responsabilité et des entités auxquelles elle est attribuée peut être entreprise uniquement à partir d’une observation concrète des sanctions positives ou négatives, qui rendent visibles qui on considère comme responsable dans une situation donnée et à quel degré.


Laisser un commentaire